Free Webzine Metal | ZoneMetal.com

zonemetal > chroniques > Gojira > L'Enfant Sauvage

L'Enfant Sauvage | chronique

acheter cet album
chronique L'Enfant Sauvage

album  : L'Enfant Sauvage
groupe : Gojira
sortie   : 2012

+ chronique Gojira
01- Explosia
02- L'Enfant Sauvage
03- The Axe
04- Liquid Fire
05- The Wild Healer
06- Planned Obsolescence
07- Mouth Of Kala
08- The Gift Of Guilt
09- Pain Is A Master
10- Born In Winter
11- The Fall
12- This Emptiness [édition bonus]
13- My Last Creation [édition bonus]


Dire moins et parler plus  par  Uldor

Son succès était annoncé depuis des mois par les médias rock du monde entier, comme retentissant. Et - excitant les fans en révélant petit à petit, mais pas totalement, ses charmes sur le net - voilà que L'Enfant Sauvage permet à Gojira de péter le score en rentrant dans le top 40 des charts américains, mais également dans le top 10 français (on n'expliquera pas en quoi cela relève de l'exploit dans notre cher pays hexagonal). On a envie de dire "enfin", mais nul n'est prophète en son pays, pas même Gojira. C'est pas faute d'avoir du talent et de proposer des œuvres originales depuis bientôt 10 ans. A l'aube de ce 5éme album attendu comme le messie, beaucoup s'enflammaient même en prétendant que le groupe landais n'était ni plus ni moins que le nouveau Metallica !

Et pourtant l'avenir de Gojira se révélait bien plus prometteur que celui de Lars Ulrich, de ses copains et de sa calvitie. Il n'y a en effet aucun doute quant au fait que Gojira a largement apporté son lot de fraicheur salvatrice pour la scène métal mondiale là où les autres patinent dans la semoule depuis 96 !
Lorsque les landais ont signé chez Roadrunner, on a tout de suite put admirer l'intelligence et la superstition du métaleux de base (probablement celui-là même qui ramène tout à Metallica) craindre que Gojira ne devienne mou, attendu, facile, bref : "commercial". Comme si le blast-beat et le trémolo picking étaient des indicateurs infaillibles d'intégrité musicale (ou d'intégrisme?) ce nouvel album ne sera pour ceux-là rien de plus qu'une marque évidente de soumission à l'industrie du disque.

Mais est-ce de la faute à l'industrie du disque si cet Enfant Sauvage n'est effectivement pas le meilleur dont ait accouché le groupe ? Si on était pas un peu chauvin on irait même jusqu'à dire que ce nouvel opus se révèle finalement comme étant le plus faible de la discographie de Gojira. Mais L'Enfant Sauvage est tout sauf un album médiocre. Il marque même une étape charnière dans la discographie des landais en nous montrant un Gojira mature qui a sut avancer plutôt que de faire du fan service. Pas de rupture musicale mais bel et bien une évolution tout à fait logique dans la continuité des deux albums précédents. La musique et sa philosophie ont continué de grandir avec ses musiciens tout au long de ce parcours ultra-intensif qu'ils ont subit ces dernières années sans flancher.

Cette fois, pour rendre sa musique plus parlante, Gojira a choisit de dire moins de choses et d'aller retrouver la sève même de sa musique à travers des compos plus simples, que ce soit dans le riffing ou dans les structures. Ces morceaux qui privilégient donc l'essentiel à la branlette se révèlent plus courts qu'a l'accoutumée et - plus simple ne voulant pas dire plus facile - regorgent d'une réelle richesse, notamment au niveau des mélodies, plus présentes que jamais.

Un album avant tout mélodique donc, à l'image de ce Joe Duplantier qui livre probablement sa meilleure prestation entre cris particulièrement déments (le titre éponyme notamment) et vocalises étonnamment chantantes et haut perchées pour du growl qui risquent de lui demander beaucoup d'efforts en live ("Pain Is A Master"). Joe ressort même le chant clair comme à ses débuts le temps d'un Born In Winter ainsi que les effets de vocoder introduits sur l'album précédent avec A Sight To Behold (Liquid Fire, Planned Obsolence, The Fall...) sans oublier ces quelques magnifiques incantations shamaniques sur le final de The Axe par exemple. La prod rend pleinement justice à cette nouvelle approche du chant en lui conférant un traitement extrêmement aéré et varié.

Une prod qui marque d'ailleurs elle aussi un gros virage, moins abrutissante que l'ensemble des productions Metal actuelle, elle permet aux compos de prendre une dimension là encore très aérée et très espacée, plus planante, à l'image de la musique du groupe qui n'a désormais recours au Blast et à la double que lorsque c'est nécessaire. Les parties de guitares sont agencées avec brio tout en laissant la basse sortir en transparence tandis que la part belle est faite à la batterie et au jeu implacable de Mario. Son jeu de cymbales, plus développé que jamais, est magnifiquement rendu grâce là encore à une intelligente utilisation de l'espace sonore.

Et malgré ce son et cette intensité, c'est pourtant la sérénité, voire la mélancolie qui ressort le plus de L'Enfant Sauvage. En cela, si on sent méchamment la patte Devin Townsend sur certains passages (l'interlude The Wild Healer par exemple) il semble que Gojira ait également fortement emprunté à la musique scandinave. Musique Scandinave qui partage bien souvent cette fascination mythologique pour la nature chère au groupes depuis ses débuts. On pense même au black metal à l'écoute de ces mélodies avec de longues notes étirées sur lit de double pédale comme sur The Axe ou encore Mouth Of Kala.

Bref, ce nouvel album de Gojira n'est pas dénué d'émotions fortes, d'idées et encore moins de musicalité, bien au contraire, on est même pris de frisson à l'écoute de l'intense mélodie en tapping de The Gift Of Guilt. Ce qui dérange c'est plutôt cette nouvelle manie d'enchaîner les riffs de manière bête et méchante sans chercher à les amener avec des transitions bien senties qui auraient souvent put faire toute la différence et peut être pallier à cette absence de morceaux phares sur L'Enfant Sauvage.

En effet pas vraiment de quoi égaler un Flying Whales ou un Vacuity, même les titres les plus émotionnels arrivent difficilement à la cheville d'un Global Warming ou d'un Oroborus. Alors ne chions pas dans la soupe que mémé a préparé avec beaucoup d'amour il faut bien l'avouer : on passe un moment tout à fait épique à l'écoute de ce nouvel album avec ses moments de rage et ses moments où nos poumons pètent à hurler d'émotion, mais trop souvent on est renvoyés à ce que Gojira a fait de mieux avant, et ça de la faute même du groupe qui commence à avoir une fâcheuse tendance à s'auto-citer, malgré ses efforts d'évolution. On espère que cela ne finisse pas carrément par virer à l'auto-parodie, alors là on pourra les comparer à Metallica sans que je me fâche.

Un bon album malgré tout, qui se hisse largement au dessus de la plupart des récentes sorties des gros groupes référentiels du moment et qui à le mérite d'avoir de l'ambition et de l'audace. Ne serait-ce qu'en donnant un titre français à leur premier grand album mainstream, les mecs de Gojira nous ont prouvé qu'ils avaient encore des couilles et de l'esprit et qu'ils feront probablement beaucoup mieux la prochaine fois! Ça sera peut être bon pour cet EP dédié à Sea Sheperd qui peine à voir le jour !

+ r�agir [ 6 commentaires ]

Hit-Parade des sites francophones